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La saga Lucas Carton portée par la grâce d’Anaïs et Hugo Bourny

MAG

29/06/2025|Noha Baz

Paris, juin 2025


J’ai découvert Lucas Carton au milieu des années 80. Entre deux cours, le temps d’une pause déjeuner, j’y retrouvais alors mon Pater et ses amis autour d’un canard Apicius ou d’un homard à la vanille. Déjeuner d’affaires pour eux, pause merveilleuse pour l’étudiante que j’étais…
Les lieux étaient déjà un des repères consacrés de la gastronomie parisienne grâce au talent d’Alain Senderens.

Place de la Madeleine, sous les lambris art déco, l’enseigne est toujours à la même place aujourd’hui, et l’accueil toujours aussi charmant.

Les souvenirs heureux se mêlent à la douceur en ce début d’été parisien, et en entrant au Lucas Carton, vous avez beau connaître les lieux, le cadre vous émerveille toujours autant.
Le décor en boiseries, signé Majorelle, patrimoine classé aux Monuments Historiques. Confectionnées de bois d’érable, de sycomore et de citronnier de Ceylan, les décorations murales sont déjà une véritable ode à la nature et à la féminité, invitant à la rêverie et à la lenteur.

En parallèle à la gastronomie, l’art continue de jouer un rôle primordial dans l’histoire de la Maison, et quelques œuvres soigneusement sélectionnées insufflent une dimension esthétique à l’espace.

L’histoire commence il y a 150 ans, lorsque Francis Carton, marchand d’art et fin gastronome, rachète ce qui constitue alors la “Taverne de France : maison Lucas.” Francis appose son nom à celui de Lucas, rebaptise les lieux et ouvre le bal.
Au fil des ans et des propriétaires successifs, plusieurs transformations vont donner un cachet élégant, intimiste et raffiné, typique de cette belle maison ; attirant les amateurs d’art et de cuisine gastronomique du monde entier. En couronnant la maison de trois étoiles, déjà en 1933 puis en 1978 avec Alain Senderens, le guide Michelin la propulse en haut de l’affiche des tables parisiennes.

En 2005, Alain Senderens rend sa troisième étoile pour offrir plus de liberté à sa cuisine, et quelques années plus tard, il décide de quitter le métier pour une retraite bien méritée.
Le départ du Chef signe alors l’ouverture d’une nouvelle page de son histoire :

C’est en 2021 que la Maison Pommery, propriétaire des lieux, confie les rênes de la table au chef Hugo Bourny, pariant avec raison sur la créativité et le talent de ce jeune homme au parcours impressionnant, qui a effectué ses classes chez Arnaud Donckele à Saint-Tropez, Anne-Sophie Pic à Valence et Hélène Darroze à Paris.

J’avais déjà croisé à plusieurs reprises Hugo et Anaïs Bourny lors de séjours à la Maison Pic à Valence. Le tandem accompagnait l’impressionnante réflexion gastronomique d’Anne-Sophie : Hugo aux fourneaux, et Anaïs sur le plan événementiel. « Nous étions, en quelque sorte, comme le dit joliment Anaïs, sa main droite et sa main gauche. »
Quelques années plus tard, et désormais unis pour la vie, c’est à deux qu’ils acceptent l’offre du groupe Vranken et prennent les rênes de la légendaire maison Lucas Carton.

Notre rencontre se passe au restaurant, en toute simplicité : retrouvailles, saveurs et éclats de rires autour de l’un des Tea Time les plus élégants de Paris.



En quelques mots, Anaïs et Hugo, pouvez-vous me raconter votre parcours ?

Hugo commence : « Je suis né et j’ai grandi en Charentes, élevé avec une cuisine française simple et traditionnelle : du beurre, de bons produits, sans souvenir d’un plat en particulier. J’ai eu la chance de travailler ensuite, pendant ma formation, dans beaucoup de lieux en France, qui m’ont donné une palette magnifique de saveurs et de couleurs, de même qu’un savoir-faire en cuisine acquis au fil de mes rencontres.
Anne-Sophie Pic a été, dans la Drôme, un mentor exceptionnel, un véritable phare, parce qu’elle a une façon unique de marier les saveurs et les épices.
Chez Lucas Carton, j’ai choisi de travailler des produits du terroir sourcés pas trop loin de Paris, auxquels je rajoute des épices, beaucoup de plantes et diverses variétés de poivres (j’aime beaucoup les poivres et la palette qu’ils offrent). J’ai plusieurs cueilleurs et plusieurs références côté épices, et j’essaie d’offrir tous les jours ce qu’il y a de meilleur, sans chercher… »

Anaïs :
« Hugo et moi ne venons pas de familles dans lesquelles la cuisine tient un rôle principal. Chez nos parents, nous mangions correctement, mais sans souvenirs repères particuliers. Disons qu’il n’y a pas eu d’influences de ce côté-là, comme c’est le cas pour beaucoup de chefs. Il n’y a pas eu, par exemple, une grand-mère, ni un père ou une mère qui nous ont mis le pied à l’étrier.
À la fin de son cursus scolaire, Hugo s’est vu proposer un apprentissage culinaire ; il s’est alors dit : pourquoi pas ?! Et s’est lancé ! Il s’est rendu compte, en fait, que la cuisine était un passeur extraordinaire d’émotions et qu’elle pouvait être à l’origine d’un émerveillement permanent.
Aujourd’hui, c’est cet émerveillement qui le pousse à chercher en permanence comment présenter au mieux un produit dans un plat. Très créatif, il tente tous les jours des mariages de saveurs, d’épices, se lance sur la piste d’une nouvelle sauce dans la quête d’un équilibre parfait des accords.
De cette recherche naissent ainsi des recettes qui reflètent son parcours, son histoire, ses racines, mais également son humeur, son terroir. C’est ce qui est, pour lui, le plus intéressant dans ce métier.
Il ne cherche pas à impressionner, mais plutôt à émerveiller. »

« Quant à moi, » continue Anaïs, « ma passion pour la gastronomie est arrivée par les livres de cuisine !
Vers l’âge de seize ans, je commençais à recevoir amis et copains de classe, et recherchais sans cesse des idées de menu. J’étais fascinée par la préparation d’une belle table autant que celle d’un bon plat. »
(Anaïs est autrice de plusieurs livres culinaires, notamment La cuisine du Portugal et un ouvrage devenu référence sur les huîtres, ndlr.)

En matière de préférences de goûts, Anaïs répond dans un éclat de rire : « Moi, j’aime tout !
Hugo cuisine merveilleusement le poisson, mais on va dire qu’il a une légère préférence pour la viande.
À part cela, nous aimons tous les deux la fraîcheur, la saisonnalité et les plantes. »



Et pour ce qui est de la transmission de votre passion à vos deux enfants ?

« Le métier étant très prenant, et Hugo merveilleusement créatif, cela lui laisse très peu de temps pour cuisiner avec nos enfants. Quelquefois, le dimanche soir, il va partager un moment en cuisine avec Léonard, l’aîné, qui, à quatre ans, est déjà un véritable petit gourmet…
Nous essayons de leur apprendre à manger sain et de saison, c’est déjà ça ! »

La quête permanente du bon d’Hugo Bourny, vous la mesurerez avec l’arrivée des plats à chaque cuillère.
Les goûts sont francs, puissants, jouant le végétal avec brio, le carnassier avec singularité, la mer avec subtilité. Les souvenirs de voyages vanillés rencontrent la camomille matricaire cueillie dans les Alpes ; le parfum des baies d’églantier fraîches s’entrechoque avec les poissons de la criée de La Rochelle, où le chef a grandi : autant de souvenirs gustatifs qui ponctuent sa cuisine et son inspiration.

Pour clôturer la partition salée, les créations du Chef Pâtissier Sylvain Goujon finiront de vous enchanter.
Ce jour-là, le pamplemousse rose de Corse s’est retrouvé dans une glace infusée au thé Sencha, suivi d’un crémeux à la sauge et poivre noir de Wayanad, totalement impressionnant par sa maîtrise et sa finesse… Pour finir, un cédrat inoubliable, enveloppé de lait ribot, escorté d’un sorbet à l’achillée millefeuille.


Côté carte des vins, le champagne Pommery trône majestueusement, mais pas exclusivement. La cave de la Maison ne compte pas moins de 700 références, dont de très belles et très rares allocations, pour un accord mets et vins aux belles émotions.

À l’étage, avec l’esprit bistrotier du Petit Lucas, vous pourrez goûter une cuisine simple, élégante et joyeuse.
Le Petit Lucas, c’est l’antichambre de la Table du Chef, qui y rassemble ce que la cuisine a de plus malicieux et festif. Des plats emblématiques de l’art de vivre à la française, une ambiance un brin espiègle et bon enfant, qui ne renie ni la délicatesse ni la coquetterie si parisienne.


Dans cette ambiance hors du temps, deux heures de tranquillité inestimables, loin du fracas du monde, entre modernité et tradition, durant lesquelles vous capterez immédiatement ce dialogue entre passé et présent dont le chef Hugo Bourny nourrit élégamment le lien, et qui vous interpelleront au décours des saveurs.
Un voyage à chaque bouchée, dans lequel vous dégusterez lentement le présent, mais devinerez surtout de très belles pages à venir !

Lucas Carton
9, place de la Madeleine – 75002 Paris
01 42 65 22 90
Réservations : restaurant@lucascarton.fr – www.lucascarton.com
Instagram : @lucascartonparis

Crédit photos :
@lephotographedudimanche
et @nohasoleils

 

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